Section 2: Les sanctions des règles de compétence Les règles de compétence peuvent déboucher sur deux situations distinctes. La première est quand la situation est incompétente, il y aura une exception de procédure qui est l'exception d'incompétence. Deuxième situation, on a deux juridictions compétentes saisies du même litige, ou deux litiges distincts qui peuvent être difficilement être tranchés indépendemment l'un de l'autre. §1: L'exception d'incompétence Ce sont les articles 75 à 91 du CPC. Cette exception d'incompétence peut être relevée d'office par le juge. Sauf que cette possibilité est restreincte, si bien que l'on a pu parler de régresseion de l'ordre public, des articles 76 et 77 du CPC et sinon cela revient aux parties. On a une procédure qui va se mettre en place, en commençant par un déclinatoire de compétence à la suite duquel il sera possible de faire un recours. A) Le déclinatoire de compétence L'exception de procédure doit être soulevé in lemine litis, avant toute défense au fond ou fin de non recevoir. L'article 75 CPC impose à la partie qui soulève cette incompétence de la motiver, expliquer la critique de la saisine du juge. Elle doit également faire connaître devant quelle juridiction elle souhaite que l'affaire soit portée. Ces deux conditions sont prescrites à peine d'irrecevabilité. Le tribunal répond ensuite en deux temps. Dans un premier temps, le tribunal examine le déclinatoire, et dans un second temps, en cas de recevabilité, le juge passe à l'appréciation du bien fondé de l'exception de procédure soulevée. Au terme de cette vérification, le juge se déclare compétent ou incompétent. Si le tribunal se déclare incompétent, il ne peut pas statuer sur le fond, il se contente de désigner la juridiction qu'il estime compétente. L'article 81 CPC précise que cette désignation s'impose aux parties et au juge de renvoi. Il en va autrement lorsque le juge estime que la compétence relève d'une juridiction répressive, administrative, arbitrale ou étrangère. On n'est plus dans le même contexte, article 81, les parties sont renvoyées à mieux se pourvoir. Dans certaines situations, pour se prononcer sur la compétence, le juge est parfois obligé de trancher une question de fond. Par exemple, la décision par laquelle un tribunal se déclare incompétent au motif que le bail est de nature commerciale. Pour savoir si le tribunal de commerce est compétent, il faut qualifier juridiquement le bail. Cette décision rendue a autorité de la chose jugée sur la question de fond, comme pour la nature du bail ici. L'article 79al2 pose cette règle d'autorité de question jugée. L'intérêt est que si la juridiction de renvoi pouvait discuter cette question, cela entraînerait une certaine condition mettant en danger la situation juridique. Lorsque le juge se déclare compétent, il dispose d'une option, soit, première possibilité, il se déclare compétent et sursoit à statuer sur le fond pendant le délai de la voie de recours ouverte aux parties contre sa décision sur la compétence. Deuxième possibilité, il se déclare compétent et statue au fond. C'est l'article 78 CPC. B) Les voies de recours ouvertes contre le jugement sur le déclinatoire de compétence Évolution majeure en la matière, car jusqu'à récemment les voies de recours ouvertes étaient de deux sortes: le contredit et l'appel. Depuis le 1er septembre 2017, le contredit a été supprimé et remplacé par un appel sur la compétence. Le tribunal a statué sur la compétence, il déclare qu'il est compétent. Cet appel sur la compétence permet d'attaquer cette décision, on attaque le chef sur lequel le juge s'est appuyé, article 83 CPC. Article 84 CPC, délai de 15 jours pour faire appel avec en point de départ la notification du jugement. Lorsque le tribunal a statué sur la compétence et le fond, l'appel formé porte soit sur l'ensemble des dispositions si le fond est possible d'appel, soit sur la compétence seulement. Quels sont les pouvoirs de la CA selon ce qui est engagé par le tribunal de première instance? Il faut distinguer selon que l'on se trouve en présence d'un appel sur la seule compétence, ou d'un appel sur la compétence et le fond. Si c'est un appel sur la seule compétence, la CA est saisie et peut estimer qu'elle s'oppose et que le juge saisi était incompétent. Deux possibilités pour la CA, soit renvoyer l'affaire à la juridiction qu'elle estime compétente, et cette décision s'impose au juge de renvoi et aux parties, article 86 CPC. Deuxième possibilité, l'évocation, la CA va évoquer l'affaire. Elle peut, plutôt que de renvoyer l'affaire à la connaissance du tribunal normalement compétent en première instance, elle peut préferer exercer son pouvoir d'évocation et retenir le litige pour le juger elle-même. Mais il faut qu'elle soit territorialement la juridiction d'appel du tribunal qu'elle estime compétent. Autre précision, quand elle fait usage de ce pouvoir, la CA invite les parties à constituer avocats dans les délais qu'elle fixe, chaque fois que les règles applicables à l'appel des décisions rendues par les juridictions dont émane le jugement d'appel l'obligent. Il y a une véritable volonté d'accélérer la procédure. Deuxième possibilité, lorsqu'il y a appel sur la compétence et le fond. La question qu'il faut se poser est "est-ce que le jugement est rendu en premier et dernier ressort?". Lorsque c'est le cas, les dispositions sur les fonds ne sont pas susceptibles d'appel, l'appel ne portera que sur la compétence. Si la CA déclare le premier juge compétent, comme il a jugé au fond, l'affaire est définitivement tranchée. Si la CA déclare le premier juge incompétent, la décision rendue sur le fond est sans valeur, mais le jugement n'est pas susceptible d'appel. La CA ne peut pas évoquer, elle doit obligatoirement désigner la juridiction du premier degré qui est compétente. Lorsque le jugement a été rendu en premier ressort uniquement, et qu'elle déclare le premier juge compétent, elle doit examiner l'affaire au fond, puisque l'affaire est transmise à la CA. Mais lorsqu'elle le déclare incompétent, il faudra désigner la juridiction qui reprendra l'affaire au fond, et cette détermination va dépendre de la compétence territorial de la CA par rapport au tribunal qu'elle estime compétent. Si elle est la juridiction d'appel par rapport à la juridiction de première instance, elle est obligée de statuer au fond, c'est l'effet dévolutif de l'appel. Mais si elle ne l'est pas, elle renvoie l'affaire. Depuis le décret du 11 décembre 2019, on a un cas particulier pour les règles de compétence au sein du TJ. L'article 82-1 CPC qui dispose que "les questions de compétence au sein d'un tribunal judiciaire peuvent être réglées avant la première audience par mention au dossier, à la demande d'une partie, ou d'office par le juge". §2: Les exceptions de litis pendans et de connexité On les avait déjà vues pour les règles de compétence. La litis pendans suppose qu'au moins deux juridictions compétentes soient saisies d'une même affaire. Le risque naît de la pluralité de parties et des options de compétence. Par exemple, avec deux créanciers solidaires, A et B, qui prêtent de l'argent à deux débiteurs solidaires, C qui habite à paris et D qui habite à Toulouse. On saisie le tribunal du domicile du défendeur. A va assigner C devant le tribunal de Paris, et B va assigner D devant le tribunal de Toulouse. Le risque est la contrariété de décisions, nous avons donc l'article 100 CPC qui vient apporter une réponse. Il décide que "si les juridictions saisies sont de même degré, c'est la juridiction saisie en second temps qui doit se désaisir au profit de la première, à la demande de l'une des parties ou au besoin d'office. Cet article 100 précise que si les juridictions sont de degré différent, l'exception de litis pendans doit être portée devant la juridiction de degré inférieur. La connexité a contrario, ce n'est pas le même litige, mais où deux affaires distinctes sont pendantes devant deux juridictions compétentes, et qui présentent un lien de connexité. L'article 101 CPC précise qu'il y a connexité lorsqu'il existe entre des affaires portées devant deux juridictions distinctes un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et les juger ensemble". Par exemple, un assureur va demander la nomination d'un expert devant le TJ. L'assuré saisie le tribunal de commerce aux fins de paiement de l'indemnité. C'est un lien de connexité essentiel, donc exception de connexité pour faire juger les demandes ensemble. Il peut être alors demander à l'une de ces juridictions de se désaisir et de renvoyer en l'état la connaissance de l'affaire à l'autre juridiction. Ce renvoi sera seulement possible si la juridiction au profit de laquelle il est demandé peut étendre sa compétence à l'affaire dont l'autre juridiction était saisie. Arrêt Soc 17 décembre 2016, qui avait jugé que la compétence exclusive du CPH interdit d'y faire échec pour cause de connexité, sauf en cas d'indivisibilité du litige. Lorsque les juridictions sont de degrés différents, l'exception de connexité ne peut être portée que devant la juridiction de degré inférieur, qui doit se désaisir au profit de l'autre, cela sera donc directement jugé en appel. Dans le cas de juridiction de même degré, le CPC n'impose pas de présenter le déclinatoire devant la juridiction saisie en dernier. Il y a des voies de recours contre les exceptions de litis pendans et de connexité, mais l'article 104 pose que les recours contre elles sont formées et jugées comme en matière d'incompétence. Partie II: Le droit commun de la procédure civile La procédure devant les tribunaux n'est pas soumise à un régime unique, elle dépend et diffère selon la nature de l'affaire. Elle dépend aussi du type de juridiction. Titre I: Les principes directeurs du procès Ces principes directeurs du procès constituent les règles fondamentales de la procédure civile, qui sont applicables sauf exception devant toutes les juridictions et en toute matière. Ces règles fondamentales figurent aux 24 premiers articles du CPC. Ce sont des règles techniques, car outre ces règles, il faut prendre en compte les principes fondamentaux du procès posés à l'article 6§1 CEDH qui est d'application directe en droit français. Certains de ces principes concernent la répartition du pouvoir des parties et du juge. On a d'autres règles, principes posés, participant au respect des droits de la défense. En procédure civile, le principe phare est celui du contradictoire, inhérent au respect des droits de la défense. Chapitre 1: Le rôle des parties et du juge dans le procès