Section 1: La juridiction contentieuse Dès qu'il y a une contestation, la fonction traditionnelle, naturelle du juge est de trancher le litige, article 12 CPC, on parle de juridiction contentieuse définitive. Mais à côté de ces juridictions contentieuses définitives, le législateur a mis en place certaines procédures rapides permettant au justiciable d'avoir des mesures ne tranchant pas le fond du droit, on parle de juridiction contentieuse provisoire. Sous-section 1: La juridiction contieuse définitive On emploit cette expression quand le juge est investi du pouvoir de trancher le fond du droit. Les juges du fond tranchent le fond du droit. Ces juridictions du fond, ou du principal, sont par exemple le tribunal de commerce, le tribunal judiciaire, le CPH, le tribunal paritaire des baux ruraux, le tribunal des affaires de la sécurité sociale. On a aussi les cours d'appel. On a la Cour de cassation qui ne tranche pas directement le fond, mais corrige la mauvaise application du droit par les juges du fond. Toutes ces décisions peuvent porter sur le fond, mais ne relèvent pas toute de la juridiction contentieuse définitive. Ce sont donc les actes de ces juges qui tranchent le droit, qui vont aussi statuer sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident de procédure. Sous-section 2: La juridiction contentieuse provisoire On emploit ce terme parce que la juridiction, dans ce cadre là, va prendre une mesure et ne pas trancher le fond du droit. Deux mesures qui peuvent être entreprises dans ce cadre. Il y a d'abord le référé, et les requêtes. Pourquoi étudier ces différentes procédures? On a ce cheminement procédural qui suppose du temps. Sauf que, on va envisaer plusieurs choses. La durée d'une procès ordinaire se trouve au coeur d'un paradoxe. Puisque cette durée va être à la fois légitime, nécessaire, avec du temps pour faire respecter les droits. Mais parfois, en cas d'urgence, cette durée peut faire obstacle à l'efficacité de la protection juridictionnelle. De ce fait, c'est à l'État qu'il incombe de remplir son devoir de protection juridictionnelle, mais il lui incombe aussi d'assurer aux citoyens une protection juridictionnelle immédiate à titre provisoire, qui sera dans le cas où la durée d'un procès ordinaire causerait un préjudice au justiciable. Cela implique que dans l'attente du jugement au fond, on a un juge qui prendra immédiatemment un certain nombre de mesures provisoires. Le juge des référés doit prendre des ordonnaces, des mesures, dans l'attente d'un jugement. C'est pour cela que c'est provisoire. §1: Les référés L'article 484 CPC énonce que l'ordonnace (ordonnance = juge unique) de référé est une "décision provisoire rendue à la demande d'une partie, l'autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n'est pas saisi du principal le pouvoir d'ordonner immédiatemment les mesures nécessaires". L'article vient préciser ce qu'est cette ordonnance en référé. C'est une décision provisoire par nature, puisque le juge n'est pas saisi pour trancher le fond du droit. Qui est ce juge? La fonction des référés est attribué au président des juridictions, comme le président du tribunal judiciaire, le président du tribunal de commerce, etc. Souvent, il délègue. Il y a également le juge des contentieux de la protection, qui a le pouvoir de statuer en référé. Il a compétence de juge unique, mais pas présidentiel. Concernant ce juge des contentieux de la protection, il rassemble diverses anciennes fonctions. En matière prudhommale cette mission n'est pas attribuée au CPH, mais une formation appellée "formation des référées", paritaire avec un conseiller employeur et un conseiller employé, commune à toutes les sections. Pas de formation de référé devant la Cour de cassation, mais elle peut quand même contrôler les décisions prises en référé. Puisque c'est une décision définitive provisoire, le juge ne statue pas au principal, il doit arrêter des dispositions provisoires de nature à remédier à un état de crise conflictuel sans pour autant trancher le litige ni fixer les droits des parties. Cela a été posé le 11 avril 1973 dans une décision du TGI de Paris. A) Les différents référés Le CPC prévoit plusieurs chefs de saisine. On va voir cinq types de référés. Ils sont dans le CPC, aux dispositions propres à chaque juridiction. 1) Le référé en vue d'obtenir toute mesure d'urgence Il sera saisi des cas d'urgence, donc le juge ne doit pas ignorer l'urgence de la situation qui lui est soumise. La notion d'urgence est un standard, il n'y a pas de définition précise, c'est laissé à l'appréciation souveraine des juges du fond. Ce type de référé est posé à l'article 834 du CPC qui nous dit "dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différent". Il y a donc deux conditions cumulatives pour engager ce type de référé: l'urgence, et l'absence de contestation sérieuse ou l'existence d'un différent. L'absence de contestation sérieuse a un caractère manifeste, sérieuse, et implique une évidence de son existence. Cela signifie que dès qu'il y a une contestation sérieuse, le juge des référés ne peut pas trancher, mais cela peut justifier son intervention. En l'absence de contestation sérieuse, le juge peut ordonner une mesure fondée sur le droit. Par exemple, absence de contestation sérieuse, on signe un contrat de vente, on achète une tablette ANDROID, on la paye. On n'est pas livré, on saisit le juge des référés, on a la facture, il n'y a pas de contestation, le juge peut ordonner la livraison ou la restitution du bien. Le juge des référés n'a pas le pouvoir de statuer au fond même en l'absence de contestation sérieuse. Il peut trancher ce qui ne fait pas partie du fond du litige. En présence de contestation sérieuse, le juge ne peut pas prendre une mesure qui préjugerait du droit. Par exemple, en cas de litige sur la livraison ou restitution, il ne peut pas statuer et ordonner une mesure sur ce sujet. Mais il peut faire autre chose, si la situation le justifie, il peut juger de la nécessité de remettre le bien entre les mains d'un tiers séquestre. 2) Le référe conservatoire ou de remise en état Ce référé est posé à l'article 835 CPC. Cet article permet au président du tribunal judiciaire ou au juge des contentieux de la protection, même en présence d'une contestation sérieuse, de prescrire des mesures conservatoires pour prévenir un dommage imminent, ou des mesures de remise en état pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Pour ce type de référé, l'absence de contestation sérieuse et l'urgence ne sont pas posées. On nous dit que même s'il y a des contestations, le juge peut intervenir pour prescrire des mesures conservatoires, pour prévenir un dommage imminent ou des mesures de remise en état [...] illicite. Le dommage imminent est un dommage qui ne s'est pas encore réalisé mais se produira si aucune mesure n'est prise. POur l'éviter, le juge peut ordonner diverses mesures conservatoires. Par exemple, pour un dommage imminent, il peut nommer un administrateur qui va gérer une entreprise en difficulté, ordonner une conciliation entre des parties en conflit, ordonner la suspension de l'exécution d'un contrat. Il y a aussi le trouble manifestement illicite, qui se définit comme la violation évidente de la règle de droit. Par exemple, l'occupation d'un immeuble sans droit ni titre, le juge des référés peut intervenir. Ces mesures de remise en état peuvent être la destruction d'un ouvrage illicite, la restitution de sommes d'argent. 3) Le référé provision Très souvent utilisé dans de nombreux contentieux, c'est l'hypothèse de créances sommes d'argent, et posé à l'article 835al2 CPC. Ce type de référé permet au juge, dans les cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable, d'accorder une provision au créancier. La provision est considérée comme une somme d'argent à valoir sur la condamnation qui sera éventuellement prononcée par le juge du principal. Ce type de référé est limité aux obligations dont l'objet va être le paiement d'une somme d'argent. Le type de créance importe peu, qu'elle soit contractuelle, délictuelle ou quasi-délictuelle. Pour obtenir une provision, on a une seule condition requise, une obligation pas sérieusement contestable. Le juge des référés est le juge de l'urgence et de l'évidence. La Cour de cassation a considéré concernant cette décision qu'il y a contestation sérieuse quand le juge doit interpréter le contrat établissant la créance entre les parties. Il faut que cela soit clair. Il a aussi été jugé par la Cour que dès lors que le défendeur ne conteste ni le dommage, ni le principe de son obligation, mais seulement l'étendu de son obligation, le juge des référés doit faire droit à la demande de provision. Concernant l'urgence, elle n'est pas condition de la saisine du référé provision. La Cour de cassation a précisé que le juge des référés pouvait accorder à titre de provision l'intégralité de la créance. On a eu un exemple où la Cour de cassation a réintroduit cette question de l'urgence dans le cadre des référés. Par exemple, on avait un contrat avec un montant du litige équivalant à 10K€, avec une clause d'arbitrage, avec la possibilité de saisir le juge des référés mais en justifiant l'urgence. Dans le cadre d'un contrat où il y a une clause préalable amiable ou arbitrale, on impose l'urgence car on ne respecte pas la clause. L'urgence a été une condition car la saisine empêchait l'exécution du contrat. Sans ce genre de clause, l'urgence n'est pas une condition. 4) Le référé injonction Ce référé permet de demander au juge, dans le cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable, d'ordonner l'exécution d'une obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. Ce référé est posé à l'article 835al2 CPC. L'urgence n'est pas requise, ce type de référé est principalement utilisé pour obtenir la restitution ou la fourniture d'un bien, notamment auprès d'un service après-vente. Il a été créé car les consommateurs achetaient des biens et étaient défavorisés dans le cas d'un retard de livraison. 5) Le référé aux fins d'obtention d'une mesure d'instruction à futur (ou référé in futurum) L'article 545 permet l'établissement de la preuve d'un fait avant tout procès. Ce type de référé permet au juge, lorsqu'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de fait dont pourrait dépendre la solution du litige, de prendre à la demande de tout intéressé toute mesure d'instruction légalement admissible. Cela implique que ce référé a pour objet d'empêcher le dépérissement d'une preuve, ou d'établir d'une preuve, permettant au juge et aux parties d'apprécier un procès au principal. C'est souvent le cas pour des litiges autour de constructions, permettant le recours à des experts. C'est un référé probatoire. On a deux conditions essentielles à ce référé: que le demandeur recourt au référé in futurum que si le jge du principal n'est pas saisi de l'affaire pour laquelle la mesure d'instrution est prononcée. Par exemple, on demande une preuve d'une malfaçon pour un bâtiment, et en fonction du rapport d'expert, on vérifie l'opportunité d'engager un procès. Deuxième condition, le demandeur doit justifier d'un motif légitime. À ce titre là, la doctrine a dessiné les contours du motif légitime. Cette notion implique plusieurs choses. Elle implique un litige futur et précis, des faits séroeux et pertinent, et que la mesure soit utile en permettant la résolution du litige future, et enfin que la demande ne se heurte pas à un obstacle, pas exemple il ne faut pas que les faits aient fait l'objet d'un procès, ou l'existence d'un secret. Lorsque l'on remplit ces conditions, le motif légitime permet d'obtenir toutes les mesures d'instructions admissibles par la loi. À côté de ces référés généraux, il existe des référés spéciaux régis par certaines dispositions du CPC ou d'autres codes. Par exemple, l'article 9 du Code civil prévoit certains types de référés. B) La procédure de référé 1) La saisine du juge des référés Ce juge des référés est saisi par voie d'assignation à une audience tenue au jour et heure habituelle des référés, assignation à jour fixe. Cas particulier si l'affaire requiert une célérité particulière, le juge des référés peut décider d'assigner heure à heure, même en cas de jour férié ou chômé. Cette citation devant le juge des référés interrompt la prescription et les délais pour agir. C'est l'article 2241 du Code civil, "la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription et le délai de forclusion". Cet effet interruptif demeure même si le juge des référés est incompétent.