La position de la doctrine privatiste classique est de réserver la qualification d'acte juridictionnel au seul jugement contentieux définitif. Est juridictionnel l'acte par lequel un juge tranche le droit. Donc les actes provisoires ne sont pas des actes juridictionnels d'après cette conception restrictive. Cette conception a été remise en cause par la doctrine contemporaine. Cette dernière a considéré que la spécificité de l'acte juridictionnel n'était pas de trancher une contestation mais de dire le droit relativement à une situation. Il existe toujours des auteurs soutenant l'ancienne conception, comme Couchez et Lagarde dans leur manuel de procédure civile. Si on observe le CPC, on constate que la matière gracieuse a intégré l'activité juridictionnelle. Le Code précise les règles de la juridiction gracieuse dans les articles liminaires, 25 à 29. Le Code ouvre explicitement les voies de recours contre les décisions gracieuses, article 543 CPC qui dit que "la voie de l'appel est ouverte en toute matière, même gracieuse, contre les jugements de première instance sauf s'il en est autrement disposé". Si l'on peut faire appel, cela relève de l'activité juridictionnelle. L'activité exercée par le juge en matière gracieuse est juridictionnelle, le doyen Cornu considérait que la matière gracieuse était le second pillier de l'activité juridictionnelle. Selon la doctrine majoritaire, sont juridictionnelles les décisions contentieuses définitives, les décisions contentieuses prenant des mesures provisoires (référés/requêtes), les décisions gracieuses et les jugements avant dire droit que le juge prend en vue de statuer sur la demande. Il s'agit des mesures d'instructions et provisoires ayant pour finalité respective d'atteindre/d'attendre la solution du litige. Cependant, le régime de chacun des actes va être règlementé, le régime de l'acte va être en fonction de ses attributs davantage que sa nature. §2: Les attributs de l'acte juridictionnel L'acte juridictionnel est soumis à un régime particulier parce qu'il est l'expression du pouvoir du juge de dire le droit. En vertu de cette caractéristique, la doctrine attribue trois effets à l'acte juridictionnel. Premier effet, l'acte juridictionnel a autorité de la chose jugée (ce qui a été jugé ne peut pas l'être une seconde fois devant le même juge). Deuxième effet, l'acte juridictionnel désaisi le juge qui l'a rendu. Il ne peut pas revenir sur l'acte, sauf exceptions. Troisième effet, l'acte juridictionnel ne peut être contesté pour malfondé ou irrégularité que par les voies de recours. Cela implique qu'il n'est pas possible de demander la nullité d'un jugement par une action en nullité ou une autre action de droit commun. Ces trois caractères ne se manifestent pas de la même intensité pour tous les actes juridictionnels. Si l'acte juridictionnel possède ces trois attributs, pas de problème. Mais un acte juridictionnel ne bénéficie pas forcément de l'ensemble de ces attributs. Les décisions contentieuses provisoires n'ont pas autorité de la chose jugée au principal et ne désaisissent pas le juge. Idem pour les jugements avant dire droit, pas d'autorité de chose jugée au principal et ne désaisissent pas le juge. Quid des actes gracieux? Déjà, l'autorité de la chose jugée est discutée en doctrine et en jurisprudence. On a une vieille jurisprudence du 3 mai 1897 refusant l'autorité de la chose jugée aux actes gracieux, qui ne désaisissent pas le juge. La Cour de cassation a même admis que certaines décisions gracieuses pouvaient faire l'objet d'une action principale en nullité, notamment en matière de changement de régime matrimonial. La jurisprudence s'écarte de l'esprit du CPC. On a donc une disparité de régimes des actes juridictionnels, qui s'explique par le fait que les caractères de l'acte juridictionnel ont été définis à l'origine à partir des décisions de la juridiction contentieuse définitive. Mais cela a été étendu par la suite. On a donc bien un décalage entre la définition moderne de l'acte juridictionnelle et les effets attribués par la doctrine à ce type d'acte. Le législateur prévoit le régime juridique des actes particuliers. Théoriquement, on n'a pas de réponse, mais en pratique on a un régime juridique, des attributs propres au jugement en fonction de chaque acte. Section 2: Les autres actes judiciaires Concrètement, la spécificité de l'activité juridictionnelle se présente lorsque l'on examine les éventualités où le juge se livre à une activité qui n'implique aucun contrôle de conformité au droit. Souvent, le juge prend des actes par lesquels il se contentera d'administrer, ou alors de constater sans contrôler. §1: Les mesures d'administration judiciaire Ces mesures désignent des actes du juge visant à une bonne administration de la justice. Cela implique que ne sauraient être considérés comme une mesure d'administration judiciaire un acte susceptible d'affecter les droits et obligations d'une partie, chambre sociale 24 mai 1995. Les mesures d'administration judiciaire sont en principe insusceptible de recours ou de REP, 2ème chambre cicile 1er février 2018 et 537 CPC "les mesures d'administration judiciaire ne sont susceptibles d'aucun recours". Les mesures d'administration judiciaire ont deux objets principaux, puisque certaines mesures assurent le bon fonctionnement du sp de la justice, tandis que d'autres assurent le bon déroulement d'une instance. Pour les premières, on peut compter les actes par lesquels les présidents des juridiction vont déléguer les fonctions qui leur sont propres, comme par exemple déléguer le rôle de tenir l'audience du référé, ou la fonction de répondre aux requêtes. On compte aussi les actes organisant le roulement des juges à l'intérieur d'une juridiction. Il y a également ceux désignant des magistrats. Il y a également les actes relatifs au règlement des audiences, leur bonne tenue. Pour le bon déroulement de l'instance, cela va être les décisions relatives à la fixation des délais judiciaires. C'est aussi les décisions de radiation, retirer l'affaire d'une juridiction. Il s'agit de décisions de jonction ou de disjonction. La jonction est quand on a deux affaires présentants entre elles des liens de connexité tels qu'il vaudrait mieux les rassembler devant le même juge. Cela consistera à rassembler plusieurs instances devant le même juge. La disjonction va être une affaire si compliquée qu'il faut séparer le contentieux en deux, dissocier l'exament de deux questions afin de les juger séparément. Ces classifications ont été établies par la doctrine pour essayer de catégoriser le nombre de mesures d'administration judiciaire. Les dispositions régissant les jugements ne sont pas applicables aux MAJ. Elles n'ont pas l'autorité de la chose jugée, elles ne désaississent pas le juge et ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles ne remplissent donc pas les conditions. la Cour de cassation est venue préciser dans plusieurs décisions que ce n'est pas susceptible de recours "même en cas d'excès de pouvoir du juge", car cela n'a pas d'ntérêt selon elle pour les justiciables. Il y a des décisions, bien que qualifier de MAJ, affectent les justiciables. Il y a des questionnements quant à leur qualification et le recours. La Cour a adopté un tempérament, en admettant la recevabilité d'un REP contre une MAJ dès lors que cette décision affecte l'exercice du droit d'appel, donc l'accès au juge, décision 2 civil 9 janvier 2020. De la même manière, la Cour a pu réserver l'hypothèse d'un REP puisqu'elle a jugé qu'une telle décision, 2ème civile 16 décembre 2021, constitue une MAJ non susceptible de recours sauf excès de pouvoir. Il y a beaucoup de MAJ venant assurer le bon fonctionnement de la justice. §2: Les actes judiciaires relatifs à l'extinction du litige Il existe une série d'actes ayant trait à la solution du litige. Ce sont des actes judiciaires ayant pour but de mettre fin au litige. Ici, il n'y aura pas de contrôle du juge. Parmi ces actes judiciaires, on pense aux actes réceptifs qui résultent de l'accord des parties, tels que les jugements de donné-acte. C'est un jugement qui fait état à la demande des parties d'une contestation ou une déclaration. Le juge peut donner acte d'une réserve, d'une concession, d'un accord. le juge peut par exemple constater l'accord que les parties lui soumettent après l'instance. On parle improprement de jugement, puisqu'il se contente de constater l'accord, l'authentifier, sans s'exprimer sur sa validité. Il n'exerce aucun contrôle de légalité. Pour ces raisons, l'acte est judiciaire mais non juridictionnel lorsque le juge constate et enterrine l'accord des parties. Après une conciliation judiciaire, le juge signe le PV, sans que ce soit un acte juridictionnel. C'est différent quand le juge rend un jugement d'expédient, un acte juridictionnel à part entière. Dans celui-ci, les parties dissimulent leur accord aux tiers et poursuivent une instance en justice, alors même qu'elles ont trouve un terrain d'entente. L'essentiel pour les parties est d'obtenir un véritable jugement au terme d'un contrôle conférant à l'acte son caractère juriductionnel. Titre 2: La théorie générale de l'action Cette théorie de l'action repose sur la reconnaissance de l'action comme expression du droit fondamental à agir en justice. Ce droit est loin d'être absolu et illimité, on s'intéressera donc aux conditions de recevabilité de l'action. L'action est un droit fondamental, désignant la prérogative en vertu de laquelle chacun peut être entendu par un juge pour lui présenter une prétention et obtenir de lui une décision sur le fond relative aux prétentions. Chapitre 1: La reconnaissance du droit fondamental d'agir en justice Jurisprudence ancienne issue du Code justinien enseignant que nul ne peut se faire justice à soi-même, posant le fondament du contrat social. Interdiction de la vengeance privée, mais en parallèle obligation de l'État d'apporter une protection juridictionnelle. À ce titre, Chiovenda disait que le fait d'interdire à quiconque de se faire justice à soi-même a pour corolaire indispensable la faculté reconnue à tous, sans discrimination d'aucune sorte, de saisir les tribunaux afin d'obtenir justice. Section 1: La consécration internationale Ce droit d'agir en justice est reconnu par les textes internationaux, d'abord à l'article 8 de la DUDH de 1948, dans le pacte international de 1966. Au niveau supranational régional, européen, c'est d'autant plus fort que de ce principe d'accès au juge, dans la CEDH, d'une part dans l'article 6 et également dans l'article 13 avec un droit à un recours effectif. La CEDH a forgé avec l'arrêt Golder contre RU du 21 fébvrier 1975 a forgé un véritable d'accès effectif au juge au profit des justiciables, dès lors que la contyestation porte sur les droits et obligations de caractère civile. Elle souligne que ce droit à un procès équitable n'aurait pas de sens s'il nétait pas reconnu implicitement le droit d'accès au tribunal. Second arrêt CEDH, Airey contre Irlande de 1979 où la Cour pose l'exigence d'un accès effectif au juge, "la convention a pour but de protéger des droits non pas théoriques et illusoires mais concrets et effectifs". Cela implique que l'État doit respecter deux ordres d'obligation. L'État se doit de garantir au justiciable l'existence du droit d'accès à un juge en instituant des organes juridictionnels devant lesquels les justiciables porteront leurs demandes. Deuxième ordre d'obligation, il incombe à l'ÉTat de favoriser une réelle possibilité pour le justiciable d'accès au juge. Autre l'égalité devant la justice, l'État doit lever tous les obstacles juridiques, financiers, matériels susceptibles de porter atteinte à l'effectivité de ce droit. Il est possible que le justiciable n'ait pas les moyens. L'État doit donc répondre et soulever des solutions pour ces obstacles, notamment l'aide juridictionnel, une aide financière pour le justiciable. Est-ce que ce droit est absolu ou non? L'arrêt Golder précise que ce droit d'accès au juge n'est pas absolu. Cela laisse aux États la faculté d'aménager des exceptions. La Cour vient tempérer que les restrictions ne doivent pas limiter l'accès au juge à un point tel qu'il s'en trouverait atteint dans sa substance même. La Cour analyse chaque limitation, et vérifie que le but poursuivi soit légitime. Il doit exister un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. C'est de là que vient le contrôle de proportionnalité de la Cour de cassation. Par exemple, si un État impose de chercher une solution amiable avant d'avoir accès au juge, est-ce qu'il y aurait une atteinte au droit d'accès au juge? Dans l'arrêt Monsilovic contre Croatie, la CEDH devait s'interroger, il y a une restriction, est-ce qu'il y a une rapport de proportionnalité entre le but recherché et les moyens? La Cour répond que dans ce cas le droit d'accès n'est pas atteint dans sa substance, mais simplement retardé. La CJUE reconnaît également le droit fondamental d'accès au juge. Section 2: La reconnaissance interne Est-ce que notre constitution reconnaît le droit d'accès au juge? Il n'y a pas de disposition à valeur constitutionnelle, donc le Conseil constitution a constitutionnalisé le droit à un recours juridictionnel effectif, sans que cela soit consacré par les textes. Il faut donc le chercher dans les Codes. En France, on n'a pas de fondement textuel, mais les auteurs du CPC ont défini l'action en justice à l'article 30 qui dit que "l'action est le droit pour l'auteur d'une prétention d'être entendue sur celle-ci avant que la juge la dise bien ou mal fondé" et "pour l'adversaire, l'action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention". Cela implique que l'action est un droit pour l'auteur de la prétention et l'adversaire. §1: La notion d'action et la distinction avec les notions voisines