Droit des groupements et des sociétés Cours de Mme H. Durand Chargés de TD : Me Marguerite Coustal-Crook et M. Moussa Sanogo TD 1 : LE STATUT DES DIRIGEANTS DE LA SOCIETE ANONYME • Commentez l’arrêt du 5 mai 2021 n°19-23-575. • Réalisez la fiche des arrêts du 8 janvier 2020, n° 18-23.991 et du 1er février 2024, n° 21-25.175 et comparez leurs solutions. • Réalisez la fiche des autres arrêts. Cass. com., 5 mai 2021, n°19-23.575 Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 septembre 2019), la société Mona Lisa Holding était la société mère d'un groupe dont les activités étaient réparties entre un pôle promotion et un pôle exploitation. 2. Le 2 mars 2009, les sociétés appartenant au pôle exploitation, parmi lesquelles les sociétés Mona Lisa hôtels et résidences (la société ML hôtels et résidences), Sol e Mar et Aurelia Maussane, ont été mises en redressement judiciaire. Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire le 28 janvier 2010, la société BTSG2 étant désignée liquidateur. 3. Le 28 janvier 2013, le liquidateur a assigné, notamment, MM. [Q] et [J], en leur qualité de dirigeants de droit, en responsabilité pour insuffisance d'actif. Examen du moyen […] Sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 5. M. [Q] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au liquidateur les sommes de 1 000 000 d'euros au titre de l'insuffisance d'actif de la société ML hôtels et résidences, 100 000 euros au titre de l'insuffisance d'actif de la société Sol e Mar, et 100 000 euros au titre de l'insuffisance d'actif de la société Aurelia Maussane, alors « que le directeur général délégué, dont les pouvoirs, leur étendue et leur durée sont déterminés par le conseil d'administration, en accord avec le directeur général, exerce une fonction d'auxiliaire de ce dernier auquel il est subordonné et n'a donc pas qualité de dirigeant de droit ; qu'en considérant que M. [Q] aurait eu qualité de dirigeant de droit de la société Mona Lisa hôtels et résidences, après avoir constaté qu'il n'avait que la qualité de directeur général délégué, de sorte qu'il était l'auxiliaire subordonné du directeur général, la cour d'appel a violé les articles L. 225-53 et L. 225-56 du code de commerce. » Réponse de la Cour 6. Contrairement à ce que postule le moyen, il résulte des articles L. 225-53 et L. 225-56, II, du code de commerce que le directeur général délégué d'une société anonyme, qui est chargé d'assister le directeur général et dispose de pouvoirs dont l'étendue est déterminé par le conseil d'administration, a la qualité de dirigeant de droit au sens de l'article L. 651-2 du même code, de sorte qu'il engage sa responsabilité pour les fautes de gestion commises dans l'exercice des pouvoirs qui lui ont été délégués. 7. Le moyen n'est donc pas fondé. Et sur le moyen, pris en sa septième branche Enoncé du moyen 15. M. [Q] fait enfin le même grief à l'arrêt, alors « qu'en condamnant M. [Q] à payer à la société BTSG ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Aurelia Maussane la somme de 100 000 euros, sans constater aucun passif, partant aucune insuffisance d'actif concernant cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 651-2 du code de commerce : 16. La condamnation d'un dirigeant sur le fondement du texte susvisé est subordonnée à l'existence d'une insuffisance d'actif certaine, laquelle détermine le montant maximal de la condamnation susceptible d'être prononcée. 17. Pour condamner M. [Q] à payer au liquidateur de la société Aurelia Maussane la somme de 100 000 euros au titre de la responsabilité pour insuffisance d'actif, l'arrêt se borne à relever l'existence de fautes de gestion et la qualité de dirigeant de M. [Q] au sein de cette société. 18. En statuant ainsi, sans préciser, au jour où elle statuait, le montant de l'insuffisance d'actif constatée dans la procédure collective de la société Aurelia Maussane, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. [Q] à payer à la société BTSG2, en qualité de liquidateur des sociétés Mona Lisa Holding, Mona Lisa hôtels et résidences, Assinie, société d'exploitation du golf et de l'hôtel de Mignaloux Beauvoir, société Hôtelière de la Valette, JD, Sol e Mar, Manoir de Beauvoir et Aurelia Maussane, les sommes de 100 000 euros au titre de l'insuffisance d'actif de la société Sol e Mar et 100 000 euros au titre de l'insuffisance d'actif de la société Aurelia Maussane, l'arrêt rendu le 12 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Cass. Com. 8 janvier 2020, n° 18-23.991 Sur le moyen unique : Vu les articles L. 225-68 et L. 653-8, alinéa 1, du code de commerce ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, dans le cadre de la procédure collective de la société Quinta industries, un arrêt du 20 février 2018, rectifié par un arrêt du 20 avril 2018, a prononcé contre M. V... une mesure d'interdiction de gérer d'une durée de trois années ; que considérant que l'interdiction de gérer s'appliquait aux membres du conseil de surveillance d'une société anonyme, le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés (RCS) de Lyon a, par une ordonnance du 11 juillet 2018, enjoint à M. V..., en sa qualité de membre du conseil de surveillance de la société anonyme Euronews immatriculée à ce RCS, de régulariser sa situation dans un certain délai, à défaut de quoi il serait procédé à sa radiation du RCS ; Attendu que, pour confirmer la décision du juge commis à la surveillance du RCS, l'arrêt retient que le mandat de membre du conseil de surveillance de la société Euronews, exercé par M. V.…, est affecté par l'interdiction de gérer prononcée contre celui-ci par l'arrêt du 20 février 2018, dès lors qu'une telle fonction, certes étrangère à celles de gestion et de direction, constitue cependant une fonction de contrôle ; Qu'en statuant ainsi, alors que l'interdiction de gérer, prévue par le second des textes susvisés, ne concerne pas les membres du conseil de surveillance d'une société anonyme qui, en vertu du premier de ces textes, n'exercent qu'une mission de contrôle de la gestion de la société par le directoire, et non une fonction de direction, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon autrement composée ; Cass. civ. 2, 1er février 2024, n° 21-25.175 Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 octobre 2021), à la suite d'un contrôle de la société Financière [M] [F] (la société) portant sur les années 2012 et 2013, l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et des allocations familiales d'Ile-de-France (l'URSSAF) lui a adressé une lettre d'observations du 6 octobre 2015 comportant notamment un chef de redressement au titre de la rémunération versée au président de son conseil de surveillance et à son vice-président, suivie d'une mise en demeure. 2. La société a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. La société fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors : « 1°/ que suivant l'article L. 311-3, 23° du code de la sécurité sociale, « sont notamment compris parmi les personnes auxquelles s'impose l'obligation prévue à l'article L. 311-2 du même code, même s'ils ne sont pas occupés dans l'établissement de l'employeur ou du chef d'entreprise, même s'ils possèdent tout ou partie de l'outillage nécessaire à leur travail et même s'ils sont rétribués en totalité ou en partie à l'aide de pourboires : (?) 23° les présidents et dirigeants des sociétés par actions simplifiées et des sociétés d'exercice libéral par actions simplifiées » ; qu'il s'ensuit que le président et le vice-président du conseil de surveillance d'une société par actions simplifiées ne constituent pas des dirigeants susceptibles d'être rattachés au régime social des salariés au regard des dispositions de l'article L. 311-3 23° du code de la sécurité sociale ; que suivant l'article 19 des statuts de la société Financière [M] [F], le conseil de surveillance ne dispose d'aucun pouvoir de gestion ni d'administration, son rôle se limitant à contrôler la gestion opérée par le directoire et son président, lequel est expressément investi du pouvoir de diriger la société ; que la circonstance que les statuts prévoient que le conseil de surveillance donne son autorisation préalable à certaines opérations accomplies par le directoire qui le nécessitent ne sauraient modifier le rôle d'organe de contrôle du conseil de surveillance ni permettre de qualifier ses membres de dirigeants de la société ; qu'en jugeant, après avoir relevé que l'article 19 des statuts de la société Financière [M] [F] limitait la mission du conseil de surveillance à l'exercice d'un contrôle permanent de la gestion du directoire, que les membres composant le conseil de surveillance de la SAS Financière [M] [F] devaient être affiliés obligatoirement aux assurances sociales du régime général aux motifs inopérants que, suivant l'article 15 des statuts de cette société, le conseil de surveillance exerçait une fonction de direction dans la mesure où l'exercice du pouvoir de décision du directoire était subordonné à une autorisation préalable du conseil de surveillance pour certaines opérations limitativement énumérées accomplies par le directoire, cependant qu'une telle autorisation préalable, qui n'est que la reprise des prévisions de l'article L. 225-28 du code de commerce et n'est pas opposable aux tiers, ne pouvait justifier légalement de qualifier les membres du conseil de surveillance de dirigeants de la société, la cour d'appel a violé les articles L. 311-2 et L. 311-3, 23° du code de la sécurité sociale et L. 227-1, L. 227-5, L. 225-68 et R. 225-54 du code de commerce ainsi que les statuts de la société Financière [M] [F] ; 2°/ que le conseil de surveillance a pour seule mission de contrôler les organes de direction de la société, sans assumer la gestion de celle-ci, dans laquelle il ne peut s'immiscer ; qu'il appartenait à l'Urssaf de démontrer que les membres du conseil de surveillance exerçaient une activité de gestion et d'administration ; qu'en affirmant péremptoirement qu'une fonction de direction au sein de la SAS Financière [M] [F] était confiée au conseil de surveillance de la société, c'est-à-dire à MM. [M] [F] et [D] [E], respectivement président et vice-président de ce conseil de surveillance, pour en déduire qu'ils avaient la qualité de dirigeant de celle-ci au sens de l'article L. 311-3, 23° du code de la sécurité sociale, tandis que l'Urssaf n'apportait aucun élément de fait de nature à démontrer que MM. [M] [F] et [D] [E] auraient exercé une activité de gestion et d'administration, la cour d'appel a violé les articles L. 311-2 et L. 311-3, 23° du code de la sécurité sociale et 1315, devenu 1353 du code civil ; 3°/ que le conseil de surveillance a pour seule mission de contrôler les organes de direction de la société, sans assumer la gestion de celle-ci, dans laquelle il ne peut s'immiscer et que seul peut être qualifié de dirigeant celui qui exerce à titre habituel une activité de direction à travers des actes positifs d'administration et de gestion ; qu'en conséquence, seuls les membres du directoire peuvent avoir la qualité de dirigeant et non ceux du conseil de surveillance, sauf à ce que soit démontré l'exercice effectif d'une mission de direction par les membres de ce dernier ; qu'en considérant que le président et le vice-président du conseil de surveillance avaient la qualité de dirigeant au motif que l'article 15 des statuts de la société prévoyait que le conseil de surveillance donne son autorisation préalable à certaines opérations accomplies par le directoire, cependant qu'il ressortait de ses constatations que le conseil de surveillance n'exerçait pas à titre habituel une activité de direction à travers des actes positifs d'administration et de gestion, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 311-2 et L. 311-3, 23° du code de la sécurité sociale et L. 227-1, L. 227-5, L. 225-68 du code de commerce ainsi que les statuts de la société Financière [M] [F] ; 4°/ que le conseil de surveillance a pour seule mission de contrôler les organes de direction de la société, sans assumer la gestion de celle-ci, dans laquelle il ne peut s'immiscer et que seul peut être qualifié de dirigeant celui qui exerce à titre habituel une activité de direction à travers des actes positifs d'administration et de gestion ; qu'en conséquence, seuls les membres du directoire peuvent avoir la qualité de dirigeant et non ceux du conseil de surveillance, sauf à ce que soit démontré l'exercice effectif d'une mission de direction par les membres de ce dernier ; qu'en considérant que le président et le vice-président du conseil de surveillance avaient la qualité de dirigeant au motif que l'article 15 des statuts de la société prévoyait que le conseil de surveillance donne son autorisation préalable à certaines opérations accomplies par le directoire, et que cela suffirait à donner une fonction de direction au conseil de surveillance, sans égard pour la circonstance que le directoire a la possibilité de passer outre un éventuel refus d'autorisation du conseil de surveillance pour les actes limitativement énumérés, en convoquant l'assemblée générale en vertu de l'article R. 225-40 du code de commerce, la cour d'appel a violé les articles L. 311-2 et L. 311-3, 23° du code de la sécurité sociale, L. 227-1, L. 227-5, L. 225-68 et R. 225-40 du code de commerce ainsi que les statuts de la société Financière [M] [F] ; 5°/ que le président et le vice-président du conseil de surveillance d'une société par actions simplifiées n'ont pas la qualité de dirigeant susceptible d'être rattaché au régime des salariés au regard des dispositions de l'article L. 311-3 23° du code de la sécurité sociale ; qu'en se fondant sur le fait que le conseil de surveillance était présidé par l'ancien président directeur général de la société, au surplus détenteur avec son épouse de la majorité du capital social de la SAS et percevant une rémunération nettement supérieure à celle des membres du directoire pour en déduire qu'il avait la qualité de dirigeant, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à justifier sa décision en violation des articles L. 311-2 et L. 311-3, 23° du code de la sécurité sociale et L. 227-1, L. 227-5, L. 225-68 du code de commerce ainsi que des statuts de la société Financière [M] [F]. » Réponse de la Cour 4. Selon l'article L. 311-3, 23°, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, sont obligatoirement affiliés aux assurances sociales du régime général les présidents et dirigeants des sociétés par actions simplifiées et de sociétés d'exercice libéral par actions simplifiées. 5. Il en résulte qu'ayant pour seule mission de contrôler les organes de direction de la société sans en assumer la gestion, les membres du conseil de surveillance ne sont en principe pas affiliés aux assurances sociales du régime général, sauf à démontrer qu'ils exercent en réalité une fonction de direction. 6. Après avoir rappelé que la société avait été constituée initialement sous la forme d'une société anonyme dont l'actuel président du conseil de surveillance était le président directeur général avant la transformation de la de la société en société par actions simplifiées disposant depuis 2016 d'un directoire confié à deux membres de la famille du président du conseil de surveillance, l'arrêt relève en substance que si la mission du conseil de surveillance est en principe limitée à l'exercice d'un contrôle permanent de la gestion du directoire, l'article 15 des statuts prévoit que le directoire ne peut accomplir certains actes, sans l'autorisation préalable du conseil de surveillance. Il retient que, par cette autorisation préalable nécessaire limitant, à tout moment, l'exercice du pouvoir de décision du directoire, le conseil de surveillance, présidé par l'ancien PDG de la société, au surplus détenteur avec son épouse de la majorité du capital de la société et percevant une rémunération nettement supérieure à celle des membres du directoire, exerçait tant en droit qu'en fait, durant les années 2012 et 2013, une fonction de direction au sein de la société, en sus de celle de contrôle et de surveillance. La cour d'appel en a déduit que le président et le vice-président du conseil de surveillance avaient la qualité de dirigeants au sens de l'article L. 311-3, 23°, du code de la sécurité sociale. 7. De ces énonciations et constatations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, faisant ressortir que malgré la création d'un directoire, les président et vice-président du conseil de surveillance avaient continué à accomplir, en toute indépendance, des actes positifs de gestion et de direction de la société, la cour d'appel a exactement déduit, sans méconnaître les règles de preuve, que ces personnes devaient être affiliées au régime général de la sécurité sociale. 8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Cass. Com., 14 mai 2013, Bull. Civ. IV, n° 80 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., administrateur, président du conseil d'administration et directeur général de la société anonyme Asterop (la société), a été révoqué de ses fonctions d'administrateur lors de l'assemblée des actionnaires réunie le 30 juin 2008 sans que ce point ait été inscrit à l'ordre du jour ; que faisant valoir que sa révocation était abusive, tant en raison de l'inobservation du principe de la contradiction que des circonstances à caractère vexatoire ayant entouré cette décision, M. X...a fait assigner la société en paiement de dommages-intérêts ; qu'il a, en outre, fait assigner aux mêmes fins M. Y...et six autres actionnaires (les actionnaires majoritaires) à qui il a reproché d'avoir commis un abus de droit en agissant de manière déloyale et d'avoir, en outre, méconnu les stipulations d'un pacte d'actionnaires auquel il était lui-même partie ; Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches : (…) Sur le second moyen : Attendu que M. X...fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen : 1°/ que les conventions obligent non seulement à ce qui y exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature ; que l'arrêt a relevé que l'article 11 (c) du pacte d'actionnaires litigieux prévoyait que " les parties s'engagent à faire en sorte qu'aucune décision ne soit prise, ni aucune action entreprise par la société concernant les questions énumérées ci-dessous (et notamment la nomination ou la désignation des personnes-clés et les conditions de leur emploi) sans l'autorisation préalable du conseil d'administration décidée à la majorité des 8/ 10èmes des administrateurs alors en fonction " ; que pour débouter M. X...de sa demande fondée sur la violation de ce pacte d'actionnaires, l'arrêt a retenu qu'aucune de ses dispositions de ce pacte n'évoque « expressément » la révocation d'une des personnes-clés ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas de l'article 11 (c) du pacte d'actionnaires que les parties avaient implicitement mais nécessairement entendu que ses dispositions soient également applicables, par parallélisme des formes, à la révocation des personnes-clés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du code civil ; 2°/ que la circonstance qu'un pacte d'actionnaires ne puisse limiter le droit pour l'assemblée générale des actionnaires de révoquer à tout moment un administrateur n'exclut pas la responsabilité des personnes qui ont conclu le pacte en cas de méconnaissance de ses termes ; qu'en déboutant M. X...de son action en responsabilité personnelle des actionnaires pour avoir violé le pacte qu'ils avaient souscrits, au prétexte que le droit, pour l'assemblée générale des actionnaires, de révoquer à tout moment un administrateur ne saurait être limité par un pacte entre actionnaires, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ; 3°/ que la cassation à intervenir sur le premier moyen, en ce que la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions de l'intimé relativement aux conditions dans lesquelles le quitus lui a été refusé et a procédé par voie de simple affirmation concernant le bien fondé des arguments et moyens des actionnaires atteindra nécessairement le chef du dispositif par lequel elle a débouté l'intimé de sa demande tendant à voir condamner les actionnaires, par application de l'article 624 du code de procédure civile ; Mais attendu, en premier lieu, qu'est illicite toute stipulation ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la libre révocabilité de l'administrateur d'une société anonyme ; qu'ayant relevé que l'interprétation du pacte d'actionnaires dont se prévalait M. X..., selon laquelle sa révocation de ses fonctions d'administrateur devait être préalablement autorisée par le conseil d'administration, aurait eu pour effet de limiter le droit de l'assemblée générale des actionnaires de révoquer à tout moment un administrateur, la cour d'appel en a déduit à bon droit que M. X...n'était pas fondé en sa demande tendant à la mise en oeuvre de la responsabilité des actionnaires en raison de l'inobservation de cette convention ; Et attendu, en second lieu, que le rejet des deuxième et troisième branches du premier moyen rend la troisième branche sans portée ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche : Vu l'article 1382 du code civil ; Attendu que la révocation d'un administrateur peut intervenir à tout moment et n'est abusive que si elle a été accompagnée de circonstances ou a été prise dans des conditions qui portent atteinte à sa réputation ou à son honneur ou si elle a été décidée brutalement, sans respecter l'obligation de loyauté dans l'exercice du droit de révocation ; Attendu que pour rejeter les demandes de M. X...dirigées contre la société, l'arrêt, après avoir relevé qu'il résultait du procès-verbal des délibérations de l'assemblée générale du 30 juin 2008 que cet administrateur avait obtenu des suspensions de séance, dont la durée totale dépassait trois heures, afin de lui permettre de contacter des tiers et de rédiger un communiqué, précise que la question de sa révocation n'a été mise au vote qu'après qu'il eut présenté ses observations écrites et orales ; qu'il ajoute que le principe de la contradiction suppose seulement que l'administrateur ait été mis en mesure de présenter ses observations préalablement à la décision de révocation et que tel a été le cas en l'espèce ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. X...avait eu connaissance des motifs de sa révocation avant qu'il fût procédé au vote, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la dernière branche du premier moyen CASSE ET ANNULE (…) Cass. com. 30 mars 2022, n°20-16.168 Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 mai 2020) et les productions, M. [Z] a été nommé président du conseil de surveillance de la société Traqueur le 18 juillet 2006 puis membre et président du directoire de cette société le 28 novembre 2016. Le même jour, M. [Z] et la société Traqueur ont conclu une convention de mandat social prévoyant diverses obligations de paiement à la charge de cette dernière. 3. Le 15 juin 2017, le conseil de surveillance de la société Traqueur a décidé de révoquer M. [Z] de ses mandats de membre et président du directoire. 4. La société Traqueur ayant refusé de faire droit à ses demandes en paiement de diverses sommes en exécution de la convention de mandat social, M. [Z] l'a assignée en paiement. Examen des moyens […] Et sur le second moyen, pris en sa troisième branche, du pourvoi n° 20-16.168 Enoncé du moyen 14. M. [Z] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement de dommages-intérêts pour révocation brutale et sans juste motif, alors « que si la révocation est décidée sans juste motif, elle peut donner lieu à dommages-intérêts ; que le simple changement de majorité ou la volonté de désigner une nouvelle gouvernance ne constitue pas un juste motif de révocation, à moins qu'elle soit justifiée par la nécessité de préserver l'intérêt social ; qu'en se bornant à affirmer, pour juger que M. [Z] ne rapportait pas la preuve de l'absence de juste motif, que la lettre du 18 mai 2017 l'informait de la volonté de la société Coyote de mettre en place une nouvelle gouvernance et que l'extrait du procès-verbal de la réunion du conseil de surveillance du 15 juin 2017 rappelait qu'il en avait été informé préalablement, sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette décision de révocation était justifiée par la nécessaire préservation de l'intérêt social, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 225-61 du code de commerce, ensemble l'article 1240 du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 225-61, alinéa 1, du code de commerce : 15. Selon ce texte, les membres du directoire peuvent être révoqués par l'assemblée générale, ainsi que, si les statuts le prévoient, par le conseil de surveillance. Si la révocation est décidée sans juste motif, elle peut donner lieu à dommages-intérêts. 16. Pour juger que M. [Z] ne rapportait pas la preuve de l'absence de juste motif à sa révocation et rejeter sa demande en paiement de dommages-intérêts, l'arrêt relève que la société Coyote l'a, par une lettre du 18 mars 2017, informé de sa volonté de mettre en place une nouvelle gouvernance. 17. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la décision de révoquer M. [Z] était justifiée par la nécessaire préservation de l'intérêt social, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il rejette les demandes en paiement de la prime en cas de cession, de la prime sur objectifs et de dommages-intérêts pour révocation brutale et sans juste motif formées par M. [Z] et en ce qu'il statue sur les dépens et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 28 mai 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;